vendredi 30 mars 2012

Mali : Le retour à l’ordre constitutionnel garantirait-il réellement la stabilité du pays ?


Victime d’un coup d’Etat mené le 22 mars 2012 par les mutins, l’autorité du président  Amadou Toumani Touré ainsi que celles de toutes les institutions de la république ont été dissoutes jusqu’à nouvel ordre. Ainsi, après avoir mis en place un Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l'État (CNRDR), les putschistes ont affirmé  avoir mis fin au régime incompétent en exercice et "à l'incapacité" de celui-ci à gérer la crise au nord du pays.

         Cependant, ces raisons n’ont pas suffi à la communauté internationale qui a très vite condamné fortement le coup d’Etat et a exigé un retour immédiat sous peine de sanctions graves à l’ordre constitutionnel c’est –à dire le rétablissement des institutions centrales de l’Etat et le respect des dispositions constitutionnelles.

Mais celui-ci garantirait-il réellement la paix dans le pays ? Représente-il la solution à long terme à adopter ? La question mérite d’être posée.

En effet, revenons d’abord  aux raisons évoquées par les acteurs du coup d’Etat  en cause aujourd’hui. Leur discours est clair, la situation désastreuse au nord du pays qui non seulement du fait des rebelles du MNLA (mouvement national de libération de l’Azawad) et des djihadistes de l’Aqmi menace l’intégrité territorial mais aussi engendre des pertes importantes en vie humaines depuis des mois et un flux massif de réfugiés dans les pays voisins plongent la population dans un climat de peur permanente. Alors un retour à l’ordre constitutionnel résoudra-t-il ce conflit et ce rapport de force quand on sait que l’ancien régime en place a mené de multiples négociations qui se sont avérées vaines ?

Ensuite, un retour à l’ordre constitutionnel implique vue l’échéance de la fin du mandat du président aujourd’hui destitué à la tenue d’élections présidentielles démocratiques et fiables. Mais ce processus sera-t-il crédible et son gouvernement considéré comme légitime alors que les populations du nord en proie à la crainte continuelle des rebelles en seront écartées ou dans l’incapacité de se rendre en toute liberté dans les bureaux de vote ?

Par ailleurs, un retour à l’ordre à l’ordre constitutionnel supposera des sanctions juridiques envers les putschistes responsables d’exactions anticonstitutionnelles. Se soumettrons-t-ils ou déciderons-t-ils de défendre contre vents et marrées leurs actions quitte à plonger le pays dans une guerre civile ?

In fine,  considérant  les tensions aujourd’hui, en cas de retour à l’ordre constitutionnel, il est peu probable que les institutions républicaines réussissent à jouer pleinement  leurs fonctions. Car une majorité des maliens soutiennent le coup d’Etat et ont d’ailleurs par milliers empêché la venue sur le territoire malien des chefs d’Etats de la CEDEAO qui avait décidé de sanctionner sévèrement cette action non démocratique en exigeant  le retour dans les casernes des acteurs du putsch. Alors l’opinion malienne étant ainsi divisée, une instabilité durable s’installera certainement dans le pays.

En définitive, s’il me paraît évident que la junte militaire n’a pas de stratégie claire, un retour à l’ordre constitutionnel n’est pas aussi simple. Il faille alors que la communauté internationale en général et les organisations sous régionales en particulier prennent en compte ces différents paramètres et composent avec les putschistes pour garantir une stabilité plus pérenne en se penchant essentiellement  sur les questions profondes.

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