mercredi 23 mai 2012

Lybie : Après Kadhafi, le chaos continue !


Face au mutisme de l’ensemble des médias sur la situation actuelle de la Lybie, il urge  néanmoins que les acteurs des révoltes et les grandes puissances s’interrogent sur les raisons profondes de l’intervention militaire. Car aujourd’hui, la situation, bien loin d’être reluisante remet en cause la cohésion autrefois existante dans le camp des rebelles.
23 octobre 2011, trois jours après l’orchestration de la mort du Guide libyen, la Lybie proclame sa libération. Le monde entier en général et les libyens en particulier croient donc en un avenir meilleur mais ils seront très vite rattrapés par l’histoire.
En effet, les inquiétudes commencent quand Mustapha Abdeljalil, président du Conseil National de Transition(CNT) instaure la Charia, la fin du divorce et le retour de la polygamie avant même la mise en place d’un processus d’élection d’une Assemblée Constituante. Or on ne peut pas à la fois parler d'élire une Assemblée constituante et décréter seul de l'instauration ou de l'abolition de telle ou telle loi. Cette décision met donc en péril les libertés fondamentales et fragilise la démocratie chèrement acquise.
Ensuite, loin de faire l’unanimité non seulement au sein de son propre camp mais aussi chez les tribus fidèles à Kadhafi, Mustapha Abdeljalil est vu comme l’homme de l’occident et n’est aucunement considéré comme légitime. Résultat : Des milices et  ex-rebelles, qui ont récupéré beaucoup d'armes, sont livrés à eux-mêmes et tentent de recouvrer les ressources qu'ils obtenaient avant la révolution. Et la solution la plus simple est la violence et le racket. C’est ainsi que le mardi 08 mai, des dizaines parmi eux ont encerclé et saccagé le siège du gouvernement libyen au centre de Tripoli. Raison évoquée, le versement inégalitaire de primes à tous ceux qui ont contribué à déstabiliser l’ancien régime alors même qu’une loi d’amnistie très controversée a été soulevée à leur égard. Au cours de cet affrontement qui donna lieu à une fusillade entre les anciens révolutionnaires et les forces de l’ordre, un  jeune policier de 19 ans mourut. Et si le CNT a fortement regretté ce décès, on a du mal à croire en sa capacité de gouvernement car comme l’a souligné Stéphanie David, de la Fédération internationale des droits de l'homme « le CNT a peur des groupes armés et peut devenir très vite un système clientéliste » du fait de ses erreurs de gestion. Erreurs qu’un conseiller du premier ministre a pudiquement reconnue en affirmant « Les financements ont dû  être suspendus. Les gens de Yefren en ont conclu à tort qu'ils en étaient exclus. C'est ce malentendu qui a déclenché leur colère. » Par ailleurs, il faut ajouter que ce n’est pas la première fois que le siège du gouvernement est attaqué par d’anciens rebelles. Le 10 avril, des assaillants armés s’en étaient déjà pris au bâtiment, provoquant l'indignation du cabinet du Premier ministre et du Conseil national de transition.
Au lendemain de cette attaque du siège du gouvernement, le vice-président présente sa démission du fait de l’atmosphère de haine qui règne dans le pays. Selon certaines sources, une foule en colère réclamant la démission du gouvernement avait alors envahi le siège du CNT à Benghazi. Et lorsque Moustapha Abdeljalil est sorti pour haranguer la foule, des manifestants lui ont lancé des bouteilles en plastique vides, obligeant les forces de l'ordre à tirer des grenades lacrymogènes. "Dégage,dégage !", scandaient les protestataires lorsque le chef du CNT a pris la parole avant de se replier à l'intérieur du bâtiment. Un incident qui n'était pas une première  puisque le vice-président du CNT avait déjà été pris à partie et bousculé  par des étudiants en colère à l'université de la ville.
En outre, théâtre d'incidents, la zone frontalière entre la Tunisie et la Libye est un point névralgique pour la contrebande en tous genres et le trafic d'armes qui a explosé depuis le conflit libyen.
Autre fait marquant de l’après-Kadhafi, le risque de partition du pays survenu après de nouveaux  affrontements dans le sud libyen entre les Toubous et d'autres tribus à Sebah. Des dizaines de personnes sont alors tués. Ainsi, le mardi, 06 mars, des chefs de tribus et de milices de l'est du pays ont proclamé "l'autonomie de la Cyrénaique". Territoire qui était l’un des trois Etats de la Libye alors fédérale à  l'indépendance du pays, en 1951. La région recèle dans son sous-sol l'essentiel des ressources en pétrole libyennes. C'est aussi de là qu'est partie la fronde anti-Kadhafi. Même si, on aurait dû s’attendre à ce genre de révolte du fait de la qualité hautement tributaire de la Libye, il faut dire que le pouvoir du CNT, dont l'unité repose plus sur son opposition à l'ancien chef d'Etat libyen que sur un projet politique commun n’est pas préparé à la division du pays.
Face à tous ceci, on se demande si les élections prévues pour juin sont tenables car le CNT ayant déjà du mal à circuler dans certains endroits du pays, on voit mal comment il pourrait organiser un scrutin. Aussi, selon des services sécuritaires, un candidat aux élections aurait été assassiné peu après avoir enregistré sa candidature auprès de la Commission électorale à Oubary (sud).
A la lumière de tout ce qui précède, on peut dire  sans coup férir que la menace d’une guerre civile est donc plus que jamais d’actualité en Libye. Alors, après la mort du guide Libyen et les conséquences dans la sous-région, il revient tout au moins aux puissances occidentales de prendre leur responsabilité dans le pays afin de ne pas trahir le vrai fondement de l’intervention militaire dans ce pays : « la liberté et la paix ». Autrement, on va bien vite en déduire que les raisons étaient essentiellement économiques et qu’il fallait asservir cet Etat pour s’octroyer les plus gros contrats pétroliers et les intérêts géostratégiques comme  ce fût autrefois  le cas en Irak, en Serbie et actuellement en Syrie.

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