Victime d’un coup d’Etat mené le 22 mars 2012 par les mutins,
l’autorité du président Amadou Toumani
Touré ainsi que celles de toutes les institutions de la république ont été
dissoutes jusqu’à nouvel ordre. Ainsi, après avoir mis en place un Comité
national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l'État
(CNRDR), les putschistes ont affirmé
avoir mis fin au régime incompétent en exercice et "à l'incapacité"
de celui-ci à gérer la crise au nord du pays.
Cependant,
ces raisons n’ont pas suffi à la communauté internationale qui a très vite
condamné fortement le coup d’Etat et a exigé un retour immédiat sous peine de
sanctions graves à l’ordre constitutionnel c’est –à dire le rétablissement des
institutions centrales de l’Etat et le respect des dispositions
constitutionnelles.
Mais celui-ci garantirait-il
réellement la paix dans le pays ? Représente-il la solution à long terme à
adopter ? La question mérite d’être posée.
En effet, revenons d’abord aux raisons évoquées par les acteurs du coup
d’Etat en cause aujourd’hui. Leur
discours est clair, la situation désastreuse au nord du pays qui non seulement
du fait des rebelles du MNLA (mouvement national de libération de l’Azawad) et
des djihadistes de l’Aqmi menace l’intégrité territorial mais aussi engendre
des pertes importantes en vie humaines depuis des mois et un flux massif de
réfugiés dans les pays voisins plongent la population dans un climat de peur
permanente. Alors un retour à l’ordre constitutionnel résoudra-t-il ce conflit
et ce rapport de force quand on sait que l’ancien régime en place a mené de
multiples négociations qui se sont avérées vaines ?
Ensuite, un retour à l’ordre
constitutionnel implique vue l’échéance de la fin du mandat du président
aujourd’hui destitué à la tenue d’élections présidentielles démocratiques et
fiables. Mais ce processus sera-t-il crédible et son gouvernement considéré
comme légitime alors que les populations du nord en proie à la crainte
continuelle des rebelles en seront écartées ou dans l’incapacité de se rendre
en toute liberté dans les bureaux de vote ?
Par ailleurs, un retour à l’ordre
à l’ordre constitutionnel supposera des sanctions juridiques envers les putschistes
responsables d’exactions anticonstitutionnelles. Se soumettrons-t-ils ou déciderons-t-ils
de défendre contre vents et marrées leurs actions quitte à plonger le pays dans
une guerre civile ?
In fine, considérant
les tensions aujourd’hui, en cas de retour à l’ordre constitutionnel, il
est peu probable que les institutions républicaines réussissent à jouer
pleinement leurs fonctions. Car une
majorité des maliens soutiennent le coup d’Etat et ont d’ailleurs par milliers
empêché la venue sur le territoire malien des chefs d’Etats de la CEDEAO qui
avait décidé de sanctionner sévèrement cette action non démocratique en
exigeant le retour dans les casernes des
acteurs du putsch. Alors l’opinion malienne étant ainsi divisée, une instabilité
durable s’installera certainement dans le pays.
En définitive, s’il me paraît
évident que la junte militaire n’a pas de stratégie claire, un retour à l’ordre
constitutionnel n’est pas aussi simple. Il faille alors que la communauté
internationale en général et les organisations sous régionales en particulier
prennent en compte ces différents paramètres et composent avec les putschistes
pour garantir une stabilité plus pérenne en se penchant essentiellement sur les questions profondes.